Pour la première fois, le CSA a retiré à une chaîne de télévision, Numéro 23, l’autorisation d’émettre. Cette décision prendra effet au mois de juin prochain. Voici le communiqué publié par le CSA :
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel, réuni en assemblée plénière le mercredi 14 octobre 2015, a décidé d’abroger l’autorisation de diffusion accordée le 3 juillet 2012 à la société Diversité TV pour l’exploitation de sa chaîne Numéro 23.
Cette décision est prononcée à l’issue de la procédure de sanction ouverte le 23 juin 2015 à l’encontre de la société Diversité TV.
Elle est fondée sur la modification substantielle des données au vu desquelles l’autorisation a été accordée, liée aux conditions d’entrée de la société UTH au capital de Diversité TV et au pacte d’actionnaires signé le 21 octobre 2013 à la suite de cette opération.
Le Conseil a relevé que les stipulations de ce pacte, conclu entre l’actionnaire majoritaire et UTH au cours de la période d’interdiction de changement de contrôle de deux ans et demi sur laquelle la société s’était engagée dans sa convention, visaient à une cession rapide de son capital.
Cette opération a été dissimulée au Conseil malgré plusieurs relances de sa part, le pacte n’ayant été finalement reçu que le 25 mai 2015. »
Pascal Houzelot était auditionné en début de semaine par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui devait se prononcer sur son projet de vente de la chaîne au groupe NextRadioTV d’Alain Weill pour quelque 90 millions d’euros.
Une vente décidée deux ans seulement après le démarrage de Numéro 23 qui avait obtenu gratuitement du CSA une fréquence hertzienne.
Ses détracteurs l’accusent de spéculation sur une fréquence publique.
Le CSA reproche a numéro 23 d’avoir caché ce projet de rachat qui avait été décidé il y a plusieurs années dans le plus grand secret, mais aussi de ne pas avoir respecté depuis son lancement son cahier des charges.
Le CSA indique: « Le Conseil a souligné que lors de son audition le 8 mars 2012, dans le cadre de l’appel à candidatures, la société Diversité TV avait fait valoir qu’elle comptait pour son développement sur un actionnariat solide et durable, et que l’autorisation avait été délivrée au vu d’un plan de financement dont l’équilibre prévisionnel était envisagé en 2019, avec une montée en charge progressive des obligations de sa convention jusqu’à cette même date ; qu’en particulier, la société n’avait jamais fait état d’un plan de financement susceptible de conduire à une cession totale anticipée, plusieurs années avant la fin de cette montée en charge.
Le Conseil a observé que la société n’a que très partiellement rempli les objectifs affirmés lors de sa candidature ; elle a ainsi fait l’objet de plusieurs rappels, mises en garde et mises en demeure.
Il relève que le montant annoncé du projet de cession de la société s’élève à 88,3 millions d’euros, somme qu’il convient de rapprocher de la situation financière de la société, de ses pertes actuelles et de son plan d’affaires prévisible.
La valorisation de la société Diversité TV, telle qu’elle ressort du projet de vente soumis à l’agrément du Conseil, lui a paru dans ces conditions reposer, à titre principal, sur la valeur de l’autorisation qui lui a été donnée.
Ainsi, les dispositions du pacte d’actionnaires du 21 octobre 2013, se réalisant finalement dans le projet de cession de la société Diversité TV soumis à l’agrément du Conseil, révèlent que son actionnaire majoritaire a, dès mai 2013, et en contradiction avec les objectifs affirmés dans sa candidature, cherché avant tout à valoriser à son profit l’autorisation obtenue, dans la perspective d’une cession rapide.
Le Conseil a considéré qu’une telle démarche était constitutive d’un abus de droit entaché de fraude, en contradiction avec la finalité poursuivie par le législateur.
En effet, le principe de gratuité d’occupation du domaine public hertzien audiovisuel, dont la protection constitue un impératif constitutionnel, répond au principe fondamental de pluralisme garanti par la loi du 30 septembre 1986, et ne vise pas à asseoir la valeur financière de la personne morale titulaire d’une autorisation délivrée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel.
Ces éléments sont de nature à remettre en cause les choix opérés par le Conseil lors de l’appel à candidatures, qui doit reposer sur le principe d’égalité, et justifient dès lors l’abrogation de l’autorisation délivrée au terme de cet appel à la société Diversité TV.
Pour assurer la protection de l’ensemble des principes et intérêts dont le Conseil a la charge, l’abrogation ne prendra effet que le 30 juin 2016.
Ce délai permet aussi à la société Diversité TV de renoncer aux conditions du pacte d’actionnaires et de la cession qui ont conduit le Conseil à retirer l’autorisation.